Syrie: la jeunesse sacrifiée par une décennie de conflit
Alors que le conflit en Syrie entre dans sa 11e année, une étude mandatée par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) met en évidence le lourd tribut payé par les jeunes Syriens.
Au total, 1400 Syriens et Syriennes âgés de 18 à 25 ans ont été interrogés en Syrie, au Liban et en Allemagne. Tous font état d’expériences similaires : liens familiaux et amicaux brisés, immenses difficultés économiques, sentiment d’inquiétude, ambitions contrariées, étapes clés de la vie manquées et profondes séquelles psychologiques laissées par des années d’instabilité et de violences incessantes.
Sachant que plus de la moitié de la population syrienne est âgée de moins de 25 ans, les résultats de l’enquête donnent un aperçu des épreuves que des millions de personnes ont endurées au cours des dix dernières années.
- En Syrie, près d’un jeune sur deux (47%) a déclaré avoir perdu un parent ou un ami proche dans le conflit. Un jeune Syrien sur six (16%) a indiqué que l’un de ses parents ou les deux avaient perdu la vie ou avaient été gravement blessés, tandis que 12% avaient eux-mêmes été blessés dans les affrontements.
- 54% des sondés ont à un moment ou à un autre perdu le contact avec un proche – au Liban, c’est le cas de presque sept jeunes sur dix.
- 62% ont dit avoir dû quitter leur foyer pour se réfugier dans une autre région du pays ou à l’étranger.
- Près de la moitié des sondés (49%) ont perdu leur source de revenu à cause du conflit, et environ huit sur dix (77%) ont déclaré avoir eu du mal à se procurer de la nourriture et des biens de première nécessité. Ce taux s’élève même à 85% en Syrie.
- 57% des jeunes qui étaient scolarisés ont manqué une ou plusieurs années d’études.
Les jeunes Syriens placent les débouchés économiques et l’emploi en tête de leur liste de besoins prioritaires, suivis par les soins de santé, l’éducation et le soutien psychologique. Les femmes ont été particulièrement touchées sur le plan économique : en Syrie, près de 30% d’entre elles déclarent n’avoir aucun revenu pour faire vivre leur famille.
L’enquête met aussi clairement en lumière l’impact du conflit sur la santé mentale. Au cours des 12 derniers mois, les jeunes Syriens restés dans leur pays ont ainsi souffert de diverses difficultés émotionnelles causées par le conflit : troubles du sommeil (54%), anxiété (73%), dépression (58%), solitude (46%), frustration (62%) et détresse (69%). Dans les trois pays à l’étude, les sondés ont désigné l’accès à un soutien psychologique comme l’un de leurs besoins prioritaires.
Malgré toutes ces difficultés, la plupart des jeunes Syriens interrogés ont déclaré envisager l’avenir avec optimisme. Leurs espoirs et leurs ambitions pour la prochaine décennie ont une portée universelle : la sécurité et la stabilité, la possibilité de fonder une famille, un emploi bien rémunéré, des soins de santé et autres services abordables et accessibles et la fin des bouleversements et du conflit.
Une crise humanitaire sans précédent
Les souffrances quotidiennes des Syriens sont pires aujourd’hui qu’elles ne l’ont été à presque tout moment au cours de la décennie de conflit qui a ravagé le pays. Tel est le message qui donne à réfléchir délivré récemment par trois hauts responsables de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge alors que la Syrie entre dans la deuxième décennie d’une crise incessante.
Le prix des produits de base ayant plus que doublé au cours de l’année dernière seulement, l’insécurité alimentaire s’est aggravée pour le peuple syrien. Environ 12,4 millions de personnes – 60% de la population syrienne – n’ont pas régulièrement accès à des aliments sains et nutritifs en quantité suffisante, et on estime que plus de 90% de la population vit sous le seuil de pauvreté.
60% de l’aide fournie provient de la Croix-Rouge
Le Croissant-Rouge arabe syrien répond aux besoins de la population syrienne depuis les premiers jours du conflit. Avec le soutien du CICR et de la FICR, soutenus par des dizaines de Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à travers le monde, les volontaires du Croissant-Rouge fournissent plus de 60% de l’aide à travers la Syrie. Sans eux, cette catastrophe humanitaire aurait été bien pire. Depuis le début du conflit, 65 volontaires du Croissant-Rouge arabe syrien et huit volontaires de la branche du Croissant-Rouge palestinien en Syrie ont perdu la vie dans l’exercice de leurs fonctions.
Dans les pays voisins que sont l’Égypte, l’Iraq, la Jordanie, le Liban et la Turquie, où environ 5,3 millions de Syriens ont trouvé refuge, le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge joue également un rôle essentiel en soutenant les réfugiés vulnérables et les communautés locales.