Journal de bord sur l'Ocean Viking #1 : À l’ancre, Siracusa
Chaque semaine, suivez le récit de notre collègue Camille, en mission à bord de l’Ocean Viking, un bateau de sauvetage en Méditerranée. Plongez au coeur des défis quotidiens, des moments de solidarité et des réalités humaines que vivent les équipes et les rescapé.e.s en mer.
Jeudi 17 octobre 2024
Météo : Légère brise, mer calme
« L’Ocean Viking est prêt à partir en mer ». La nouvelle est tombée samedi après-midi après une longue attente. Moins de 48h plus tard je prenais mon vol pour Catania, en Sicile, pour rejoindre Syracuse ou le bateau attendait tout l’équipage.
Arrivée au port alors que le bateau est à ancre, j’ai juste quelques minutes pour m’acheter un morceau de pizza avant mon embarquement. Il est 19 h, le soleil se couche a l’horizon et il fait encore doux. Je monte à bord du bateau taxi et vois déjà l’Ocean Viking au loin ; il est tout brillant et paraît si grand dans la nuit. Je me dis que c’est sans doute comme ça que les rescapé.es le voient pour la première fois quand les sauvetages ont lieu la nuit.
Quand je remets mes pieds sur le bateau, émue, c’est Ralph qui est au boat landing, et c’est lui qui me tend la main pour que je monte à bord via l’échelle, en essayant de ne pas vaciller avec mon sac de 21,6 kilos sur le dos. Je retrouve certain.es collègues sur le deck ; on s’embrasse chaleureusement tandis qu’avec les nouveaux visages, c’est plus timide, on se serre la main, mais je sais que d’ici quelques jours, tout sera différent.
Les premiers jours sont toujours un peu comme ça : on se réapprivoise, on se forme, on s’entraîne. Il faut aussi préparer l’équipage pour les sauvetages à venir. La logistique est immense : il faut que tout soit prêt. On prépare les rescue kits, on nettoie les containers où ils et elles dormiront bientôt, on fait l’inventaire des médicaments. Chaque geste compte, chaque tâche rapproche un peu plus le bateau du départ. Les journées sont longues, rythmées par la rigueur maritime (et ils ne rigolent pas sur la ponctualité), les repas sont toujours servis beaucoup trop tôt à mon goût (17 h 45), mais l’air de la mer nous fatigue tellement qu’on va toujours dormir assez tôt.
On peut sentir dans l’air que tout le monde a très envie de partir dans la zone de Search and Rescue, mais on sait aussi que rien ne doit être laissé au hasard et qu’il faut qu’on soit vraiment prêt.es avant de larguer les amarres.