Soudan : une catastrophe invisible qui s’aggrave chaque jour

Le 15 avril 2025 marque une date sombre pour le Soudan : cela fait maintenant deux ans que le pays s’enfonce dans l’une des pires crises humanitaires au monde. Et pourtant, ce conflit continue de passer largement inaperçu.
Une crise humanitaire sans précédent
Ce ne sont pas les chiffres ni les témoignages qui manquent pour illustrer l’ampleur de la crise.
Depuis le début des affrontements, plus de 12,6 millions de personnes ont été contraintes de fuir leur foyer. Parmi elles, 8,6 millions sont déplacées à l’intérieur du pays, tandis que 3,8 millions ont cherché refuge dans des pays voisins comme le Soudan du Sud, l’Égypte, l’Ouganda ou encore le Tchad.
C’est le cas de Someya, dont le papa a été tué à la mosquée après la prière du soir. « Quand nous sommes arrivés au Tchad pour nous réfugier, j’ai essayé de travailler sur un chantier, mais c’était physiquement difficile et ils ne me laissaient pas allaiter le bébé. Maintenant, je fais la lessive chez les gens. Au Darfour, nous avions une bonne vie et suffisamment de nourriture. Ici, au camp, c’est très différent. À un moment donné, j’ai arrêté de donner du lait maternel parce que je ne mangeais pas assez. Même si je pouvais rentrer, je devrais tout recommencer à zéro. Ma maison a brûlé. J’ai tout perdu. »
La situation au Soudan est en effet dramatique : villes détruites, services publics paralysés, systèmes de santé à genoux. L’ONU estime que plus des deux tiers de la population soudanaise, soit environ 30,4 millions de personnes, ont aujourd’hui besoin d’une aide humanitaire urgente. La moitié sont des enfants.
La Croix-Rouge soudanaise en première ligne
Présente dans les 18 États du pays avec près de 12.000 bénévoles, le Croissant-Rouge Soudanais est un pilier pour les communautés touchées. Malgré les dangers, les pénuries, et la perte de collègues tombés en mission, elle a pu atteindre plus de 7,5 millions de personnes avec une aide vitale : nourriture, eau potable, soins médicaux, soutien psychosocial, enterrements dignes…
« Nous avons perdu des volontaires et des membres du personnel. Nos ambulances, équipements médicaux et entrepôts ont été détruits ou pillés. Mais nous n’avons jamais cessé », affirme Aida Al-Sayed Abdullah, Secrétaire générale du Croissant-Rouge soudanais.
Santé, protection, alimentation : les défis s’accumulent
Avec 80 % des établissements de santé non fonctionnels dans les zones de conflit, le pays fait face à une explosion des épidémies : choléra, dengue, rougeole, paludisme… En 2024, 12 États ont été touchés par des flambées simultanées. En mars 2025, plus de 58.000 cas de choléra ont été enregistrés.
Dans les camps de déplacés comme celui de Zamzam (Nord-Darfour), où vivent aujourd’hui plus de 500.000 personnes, les familles survivent dans des conditions extrêmement précaires, souvent sans nourriture, ni eau propre, ni soins médicaux.
La situation des enfants est alarmante : 90 % des écoles sont fermées, et beaucoup d’enfants sont séparés de leur famille, enrôlés de force ou victimes de violences sexuelles et de mariages précoces.
Face à cette urgence, la Croix-Rouge apporte aussi un soutien vital en matière de protection : espaces sûrs, accompagnement psychosocial, kits de dignité, soutien aux victimes de violences sexuelles… Plus de 650 000 personnes ont bénéficié de ces services à ce jour.